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De Bloomsbury en passant par Court green...
1 octobre 2013

Chaque jour est un adieu - Tout ce qui reste de nos vies

 

Chaque jour est un adieu
Tout ce qui reste de nos vies
d’Alain Rémond 

L’automne est là, la vigne vierge commence à rougir, les feuilles de glycine tombent… oui c’est l’automne. L’automne avec son lot de joies et de tristesses. Cet automne pendant lequel une de mes sœurs se trouve seule face à une très grave maladie… Cet automne que j’aimerai voir passer le plus rapidement possible, pour la revoir sourire et ne plus souffrir. Mais, il faut attendre… attendre… peut-être nous aurons besoin de vous, peut-être pas… terrifiant, c’est terrifiant de voir quelqu’un que l’on adore souffrir et ne rien pouvoir faire, ne pas savoir quoi dire… juste être là, ne pas faire voir sa terreur, juste dire que si un peu de moi peut t’aider je te le donne…

Cet automne, va être long, long, très long. Alors, ne pouvant me réfugier près des gens, je me réfugie près des livres… plus je vieillis, plus je me demande s’ils ne sont pas mes meilleurs amis… ils ne me laissent jamais tomber ;o)

Bats-toi ma sœur, bats-toi, je t’aime, nous t’aimons.

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Alors, je ne sais pas si c’était prémonitoire, mais il y a quelque temps, j’ai relu « Chaque jour est un adieu » et « Tout ce qui reste de nos vies » d’Alain Rémond. Il relate son enfance avec ses parents et ses 9 sœurs et frères, l’histoire de sa famille, les lieux de vie, le quotidien, les joies, les peines… Chez moi, nous ne sommes pas 10 mais 5 et je vous assure que c’est déjà une belle tribu, et par moment dans le livre, j’avais l’impression de nous retrouver. Je me suis dit alors, que le plus important reste la famille, plus vraie que l’amitié parce que ses racines en sont plus profondes, et, ses  bases plus solides.

Bref, la famille, on ne la choisit peut-être pas, mais elle est là du premier jour au dernier, elle réagit, elle agit, elle soutient… et dans ce livre, j’ai retrouvé tout cela. La famille faite de joies, de chicanes et surtout de complicité.

Au fil de ces deux récits, il nous livre ses souvenirs, ses émotions, des moments de vie inoubliables, mais aussi ses regrets, ses brouilles.

Il laisse une note de nostalgie, et en même temps un grand sourire. Il y a derrière tout cela, la vie, le quotidien, les drames aussi… que malheureusement chacun d’entre nous rencontrera dans sa vie. Bien sûr, nous avons tous notre propre histoire, mais le goût de l’enfance avec sa pointe d’insouciance, de rêve laisse à la plupart d’entre nous un doux goût de liberté.

 J’ai beaucoup apprécié dans « Tout ce qui reste de nos vies » le début du livre, qui en fait explique le pourquoi de ce livre.

Extraits du premier chapitre 
Il pleuvait comme si c'était la fin du monde, une pluie longue, épaisse, interminable. Nous étions là, trempés, transis, en quête d'un abri, n'importe quel abri. Nous avions prévu de nous asseoir au soleil, dans l'odeur de l'herbe et le bruissement des feuilles. Après tout, nous étions au mois d'août

Alors nous avons cherché un abri, une cabane, une étable, trois planches et un toit de tôle, juste pour être au sec.

Et là, près d'une chapelle, en pleine campagne, nous l'avons vue : une ferme abandonnée, vide et silencieuse, portes et fenêtres fermées, condam­nées. À quelques mètres : un grand hangar, au milieu d'un terrain livré aux ronces et aux orties. Après nous être assurés que la ferme était bien vide, sans âme qui vive, nous nous sommes précipités sous le hangar, secouant nos vêtements comme des chiens sortant de l'eau, écoutant en silence le crépitement de la pluie sur la toiture.

Nous étions là comme au milieu de la mort, avec cette pluie qui tombait longuement, déses­pérément, et ces vieilles choses abandonnées. Ce qu'il y avait d'étrange, c'était cette impression de désordre, une maison vidée à la hâte, n'importe comment, comme avant un départ précipité. Comme pour un sauve-qui-peut. Puis nous avons commencé à regarder d'un peu plus près ce qu'il y avait sur le sol de terre battue, entre les machines et les outils, les chaises et les tables. Dans des caisses en carton, ou même par terre, en vrac, il y avait des papiers. De vieux papiers jaunis, maculés de taches, grignotés par les souris. Des papiers oubliés, eux aussi, jetés là, eux aussi. Machinalement, nous nous sommes baissés pour en prendre un ou deux, imaginant de vieilles réclames, des bons de réduction, des notices d'appareils. Mais non. Mais pas du tout. Tous ces papiers étaient des papiers de famille. Fiches d'état civil, extraits de naissance, livret de famille, actes de vente, contrats de bail, reconnaissances de dette, livret militaire, ordre de mobilisation, ordre de réquisition, relevés bancaires, dans les années vingt, les années trente, les années quarante.

Et voilà que des inconnus, des étrangers, lisent tous ces vieux papiers jetés au vent, sous le hangar. Voilà que des inconnus, des étrangers, profanent cette vie, le mystère, le secret de cette vie. Ils peuvent tout lire. Ils peuvent tout savoir. Oui, tel était notre sentiment alors que nous lisions, incrédules, tous ces papiers qui nous brûlaient les mains. Nous étions tels des cambrioleurs pénétrant par effraction dans l'intime d'une vie. Tout était là, sous nos yeux. Nous avions envie de tout lire, nous ne pouvions pas nous en empêcher. Et nous en avions honte.

On ferme. On vide. Et on jette tout. Voilà tout ce qui reste de ces vies balayées : des papiers que profanent des inconnus, des étrangers.
Et c'est une telle pitié.

p. 38
Et quand on a eu l'eau, c'était uniquement l'eau froide, au robinet de l'évier, tout le monde faisant sa toilette dans une cuvette, là, dans la cuisine. Une maison, bien entendu, sans la moindre valeur, achetée une bouchée de pain par, mon père en 1952, pour notre retour en Bretagne. Mais c'était notre maison à nous, la maison des Rémond, où nous avions tout vécu, le bonheur de l'enfance, la chaleur de la tribu et l'enfer de la guerre entre mes parents, l'enfer de la mort de l'amour. C'était la maison de toutes les maisons. Le refuge, le cocon, pendant les longues années de pensionnat. La maison des discussions sans fin, la maison des lectures sans fin, la maison des amis qui s'invitaient, qui s'asseyaient autour de la table et qui nous faisaient rire, avec toutes leurs histoires. Oui, la maison des rires. Mais aussi la maison des cris. Des disputes et des querelles sans fin, entre mes parents.

 

Tout ce qui reste de nos vies d’Alain Rémond. Éd. Seuil
Chaque jour est un adieu, Alain Rémond. Éd. Seuil.

livres

 

famille

Claude

 

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Commentaires
J
Merci, merci beaucoup<br /> <br /> Claude
Répondre
P
Pensées affectueuses et sincères pour vous et les votres.
Répondre
De Bloomsbury en passant par Court green...
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