Éthan Frome
Ethan Frome
d’Édith Wharton
Un homme, notre narrateur, arrive à Starkfield dans le Massachussetts pour affaires. Il observe un homme, un homme qui l’intrigue. P. 14.Ce n'était pas tant sa haute taille qu'on remarquait, car les « autochtones » se distinguaient sans mal, avec leurs longues et maigres silhouettes, des spécimens étrangers, plus trapus : c'était l'air à la fois détaché et imposant qu'il avait, bien qu'affligé d'un boitement qui entravait chacun de ses pas, saccadés comme s'il avait les pieds enchaînés. Il y avait dans son expression quelque chose d'austère et d'impénétrable, et il était si raide et si gris que je le pris pour un vieillard et fus surpris d'entendre qu'il n'avait que cinquante-deux ans.
Sa curiosité l’amène à poser des questions, et, il apprend son histoire par la bouche de voisins, d’anciens amis et enfin, par Ethan lui-même. P. 23 Tous les habitants de Starkfield, comme dans d'autres communautés plus illustres, avaient eu leur lot de problèmes, suffisamment pour les rendre relativement indifférents à ceux de leurs voisins; et, bien qu'ils fussent tous d'accord pour convenir que ceux d'Ethan Frome étaient démesurés, aucun ne réussit à m'expliquer cette expression, sur son visage, que, je persistais à le croire, ni la pauvreté ni la souffrance physique ne pouvaient avoir engendrée. Néanmoins, je me serais contenté de reconstituer l'histoire à partir de ces maigres fragments, si Mrs. Hale n'avait pas gardé ce silence si provocant, et si - un peu plus tard - le hasard ne m'avait pas permis d'entrer directement en relation avec l'homme.
Une histoire d’amour tragique, terriblement triste, tout en nuances, qu’Édith Wharton a su rendre avec toute sa sensibilité, et son horreur.
Le narrateur aura l’occasion de parler avec Ethan, ce dernier le conduira chez lui, et là, dans ces dernières pages toute l’ampleur de trois vies gâchées nous saisit. Lorsque je suis « entrée » dans les derniers tableaux du livre, j’ai cru me retrouver dans la maison d’Heathcliff dans les Hauts du Hurlevent, après la mort de Cathy, j’y ai ressenti un désespoir et une tristesse à peu près comparable.
C’est un très beau roman d’Édith Wharton, les personnages, les ambiances, les détails y sont magnifiquement rendus.
J’ai pris le parti de ne pas vous raconter l’histoire d’Éthan car il faut mieux la découvrir.
Claude
Première page
Ethan Frome
Je tiens cette histoire de plusieurs sources, qui m'en ont chacune raconté un fragment, et, comme il arrive généralement dans ces cas-là, c'était chaque fois une histoire différente.
Si vous connaissez Starkfield, Massachusetts, vous connaissez le bureau de poste. Si vous connaissez le bureau de poste, vous avez sûrement vu Ethan Frome y arriver dans son buggy, lâcher les rênes sur l'échine tordue de son cheval bai et traverser en se traînant le trottoir de briques jusqu'à la colonnade blanche : et vous avez sûrement cherché à savoir qui il était.
C'est là que, il y a plusieurs années, je l'ai vu pour la première fois; et, en le voyant, je me suis arrêté brutalement. Même à cette époque, il demeurait le personnage le plus frappant de Starkfield, bien qu'il ne fût plus qu'un homme brisé.
Ethan Frome d’Édith Wharton, traduit de l’américain par Julie Wolkenstein. Éd. P.O.L