Ton histoire Mon histoire de Connie Palmen Enfin
Ton histoire Mon histoire
de Connie Palmen
Enfin un livre qui ne fait pas passer Ted Hughes pour un monstre ! Enfin un livre intelligent qui lui rend un bel hommage, tout autant qu’à Sylvia Plath.
Ton histoire Mon histoire a été écrit à partir des écrits de Sylvia Plath et du dernier livre de Ted Hughes « Birthday Letters ».
Je parle ici de ce dernier recueil de poésies, car on ne peut pas lire Ton histoire Mon histoire, sans relire au fur et à mesure « Birthday Letters ».
Après le suicide de sa femme, Ted Hughes ne s’était jamais exprimé, d’autres s’en étaient chargés ! Comme bien souvent lorsque survient un malheur, les gens parlent sans savoir, ou en croyant savoir, ce qui est détestable ! Bref, il avait préféré le silence et s’occuper de ses enfants plutôt que de répondre à toutes les accusations malveillantes que les médias et les soi-disant amis se faisaient une joie de répandre. Comme bien souvent, les faiblesses psychologiques de Sylvia Plath sont passées au second plan.
Jamais pourtant, il n’a cessé d’écrire sur elle. Aussi, quelques mois avant sa propre mort, il avait décidé d’éditer le magistral « Birthday Letters », son témoignage à lui.
Pages 227-228. Dans les années qui ont suivi sa mort et à présent, alors que j’essaie de combler par de la poésie le trou que son suicide a creusé en moi, que j’entretiens, dans un dialogue posthume, la conversation que je n’ai jamais pu avoir avec elle, que j’achève les quatre-vingt-huit lettres d’anniversaire à ma jeune épouse afin de revendiquer ma version de notre amour et la restitution de mes souvenirs comme un droit légitime que je laisse la version poétique de son histoire transparaître comme un écho, dans la mienne, je nous revois souvent assis pour la dernière fois ensemble devant le feu dans le salon rouge cramoisi, avec nos mots qui se fondent dans la lueurs des flammes, un corps, un esprit, un mariage de mots.
Dans « Ton histoire Mon histoire », Connie Palmen donne la parole à Ted Hughes. Le livre est écrit en grande partie à partir de ses souvenirs à lui, de ses poèmes, sans jugements, sans accusation. Elle remet les évènements à leur place, les idées reçues au placard.
C’est un livre très prenant, un livre que j’ai vraiment eu beaucoup de mal à quitter…
Merci Andréas de m’avoir conseillé ce livre et cette auteure, tu as raison mon ami, ce livre remet l’histoire à sa place. Fabuleux !
Au fil du livre, des annotations nous renvoient au recueil de poésies. J’ai trouvé ça vraiment génial, et si comme moi, vous aimez la poésie de Ted Hughes, hé bien, vous relirez le recueil en entier !
L’écriture de Connie Palmen est très fluide, directe, sans fioriture. Je suis d’ailleurs en train de lire un autre de ses livres.
Claude
Première page
Pour la plupart des gens, nous n’existons que dans un livre, ma femme et moi. Ces trente-cinq dernières années, je me suis résigné à observer avec répugnance comment nos vies, nos vies réelles, ont été englouties sous des torrents boueux de récits apocryphes, de faux témoignages, de ragots, d’affabulations, de mythes, comment nos véritables personnalités, qui sont complexes, se sont muées en personnages stériles réduits à des stéréotypes taillés sur mesure pour un public de lecteurs avides de sensations fortes.
Bien entendu, elle était la sainte, la fragile, moi le traître et le méchant.
Je me suis tu.
Jusqu’à maintenant.
Ton histoire Mon histoire de Connie Palmen, traduit du néerlandais par Arlette Ounanian. Editions Actes Sud.
PARCE QU’ON NE PEUT PAS LIRE « TON HISTOIRE MON HISTOIRE » sans relire ou lire « BIRTHDAY LETTERS ».
Lumière parfaite
Tu es là, dans toute ton innocence,
Assise parmi les jonquilles, comme sur un tableau
Où tu aurais posé pour illustrer « l’innocence ».Dans tes bras,
Comme un nounours, ton fils tout juste né,
A quelques semaines seulement de son innocence.
Mère et enfant, comme un tableau de la Sainte Famille.
Et, à tes côtés, les yeux levés vers toi, rieuse,
Ta fille, deux ans à peine. Comme une jonquille
Tu penches la tête vers elle, tu lui dis quelque chose.
Tes mots se sont perdus dans l’appareil photo.
Et le savoir
Acquis par la colline sur laquelle tu es assis,
Une colline comme la douve d’un fort,
Plus grande que ta maison,
N’a pas réussi à apparaître sur la photo. Et l’instant
Qui pour toi devait venir,
S’approchant de toi comme un fantassin,
S’éloignant lentement de son no man’s land,
S’est incliné sous quelque chose, ne t’a jamais atteinte-
S’est fondu dans la lumière parfaite.
Page 161, Birthday Letter de Ted Hughes,traduit de l’anglais par Sylvie Doizelet. Edition Gallimard.