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De Bloomsbury en passant par Court green...
20 mars 2020

Et l'amour aussi a besoin de reposde Drago Jancar

Et l'amour aussi a besoin de repos
de Drago Jancar
 

Je me suis replongée dans l'histoire de la Yougoslavie et de toute cette région du globe lorsque j'ai commencé ce beau livre.

C'était un peu imprécis pour moi.

En 1941, l'armée allemande a envahi Maribor, ville slovène et anciennement germanophone. Elle est rebaptisée Marburg an de Drau. Comme dans beaucoup de villes pendant la guerre (quelque soit le pays) les amis d'hier peuvent devenir les ennemis, la suspicion règne...

 

Dans cette ville vit Sonja, une étudiante qui aime Valentin, un résistant qui a été arrêté par les SS. Page 31. Il y eut du tapage dans le couloir, quelqu'un ouvrit le judas de sa cellule. Valentin bondit du châlit et se tint au garde-à-vous. La lumière l'aveugla, on avait éclairé de l'extérieur, l'ampoule située haut sous le plafond avait été allumée par un interrupteur situé dans le couloir. Il vit des yeux qui l'observaient. Il se mit à trembler de tout son corps. Maintenant ils vont le faire monter et l'interrogatoire va recommencer.

 

Un jour, qu'elle se promène avec une amie, Sonja reconnaît un officier SS, qui avait été soigné par son père médecin avant la guerre. Un peu plus âgé, il a vécu à Maribor, il s'appelait alors Ludek. Sonja voit alors une occasion pour aider Valentin. Mais, la guerre, les SS l'ont transformé en Ludwig, et Ludwig n'est plus Ludek.

La guerre va changer radicalement leurs trois vies, leurs avenirs. Elle va bouleverser leurs perceptions du monde.

Valentin sera libéré, mais la guerre continuera.Page 183. Borben secoua la tête.

-Curieuse histoire. Ça pue la désertion.

Vasja dit qu'il croyait Valentin. C'était arrivé, ils l'avaient pris. Il avait tenu le coup. Maintenant il le prouverait par ses actions.

  • Qu'il le prouve, alors, dit Borben.

Vasja dit que c'est le chef de la section Polde qui dirigerait l'action.

Valentin était content que Polde vînt. C'était un des rares qu'il connût dans l'unité. De ceux qui étaient restés en vie après ce terrible hiver. Le commandant Matevz était tombé, beaucoup étaient tombés, certains avaient été pris comme lui, Valentin. Maintenant, il allait prouver qu'il était toujours le même qu'avant, avant qu'on le prît : un combattant pour la liberté du peuple slovène, comme on disait, un combattant dévoué. Jamais il n'avait cessé de l'être.

 

Ludwig, n'est plus Ludek. Il est devenu un être froid, inhumain, Pages 71-72 Il a été longtemps convaincu qu'il arriverait à de bons résultats avec des questions croisées bien posées. Il avait lu un livre de psychologie et il savait que l'interrogé, tôt ou tard, devait se trahir par son visage ou par ses gestes. Les yeux surtout, les yeux sont le miroir de l'âme. Si on regarde un homme au fond des yeux, il se met à parler. Mais il s'est avéré que ses longues discussions avec les suspects qui s'étiraient parfois tard dans la nuit ne menaient nulle part. Avec un certain Ravbar, oui c'est ainsi qu'il s'appelait, il avait discuté presque une semaine, jour après jour, même le dimanche et toute la nuit jusqu'au lundi matin. On l'avait pris avec u n paquet de matériel de propagande ronéotypé pour leur soi-disant Front de Libération dans lequel étaient accumulés des mensonges si répugnants sur le mouvement et le Führer que ses cheveux s'étaient dressés sur sa tête. Il savait tout sur lui et sur sa famille jusqu'à la troisième génération, sur ses camarades de beuverie dans les mastroquets des environs. Mais il n'avait pas avancé d'un millimètre sur l'endroit où ces saletés avaient été imprimées ni sur qui leur avait fourni le papier. Alors il avait abandonné et, sur les conseils de Hans, avait utilisé la cravache, en fait le nerf de bœuf. À l'instant où il l'avait sorti du tiroir, il avait vu les yeux de ce brigand de Ravbar se rétrécir. Le miroir de l'âme, c'était la peur. Cette peur que son interlocuteur pendant leurs discussions avait progressivement oubliée. Et quand il en avait eu assez, quand une terrible fureur s'était emparée de lui : pourquoi donc est-ce que je parle à cet homme ? Quand il s'était demandé pourquoi il perdait son temps en faisant de la psychologie, une première fois, il lui en avait flanqué un coup de sa propre main sur le dos, alors sa chemise s'était déchirée et le sang avait jailli de sa peau fendue. Et quand Ravbar avait vu son sang sur les bras de Mischkolnig, l'affaire était allée vite. À chaque coup, il avait obtenu un suspect de plus sur la liste.

 

Sonja se retrouvera seule dans cette guerre sans fin. Pages 116-117, Sonja avait marché toute la journée dans la ville. Elle s'était réveillée à quatre heures du matin, avait regardé le plafond jusqu'à l'aube, elle s'était levée, avait été à la fenêtre puis s'était recouchée : qu'est-ce que j'ai fait, qu'est-ce qui s'est passé ?

Elle avait vu Tine s'en aller sur la route humide, il était parti sans lui dire au revoir.

 

Les personnages sont magnifiquement décrits, leurs sentiments sont perceptibles à chaque ligne. Drago Jancar nous emmène au cœur de la guerre, loin du front mais dans le cœur des hommes. C'est un roman passionnant, un beau roman d'amour sur fond politique, où règne une atmosphère à la fois mélancolique et glaçante.

J'ai beaucoup aimé le début, en fait l'auteur décrit la photographie de couverture, et toute l'histoire commence, là dans la rue de Maribor.

Claude

 

Première page

I – La fille sur la photo

Sur le cliché pris par un photographe inconnu, deux filles sveltes : la première en jupe légère à carreaux et chaussettes sombres, l'autre dans un élégant manteau noir et avec deux belles tresses qui lui tombent dans le dos. Celle-ci ne porte pas de chaussettes, à l'évidence, ce sont les derniers soupirs, les derniers vestiges d'un été chaud, peut-être les premiers jours de septembre. Image matinale de citadins qui se pressent vers leurs affaires, femme qui porte un cartable, pourtant certains musardent, désœuvrés. Ici, un homme à vélo bavarde avec quelqu'un, probablement du temps, un autre, en ce jour de grâce, tire sur sa cigarette et expire de grandes bouffées de fumée. Un œil attentif pourrait noter qu'il est arrivé quelque chose à l'écriteau du grand bâtiment : HOTEL OREL a été transformé en HOTEL ADDLER ; une petit correction, le propriétaire, pratique, a seulement commandé deux nouveau caractères A et D, puis il a transformé le RESTAVRACIJA en RESTAURANT. Dans le coin droit en bas, un homme en uniforme marche, il tourne le dos au photographe. Bottes noires, verste militaire grise, pistolet à le ceinture. L'image idyllique d'un paisible après-midi d'automne précoce dans une rue de Maribor laisse soudain place à un instant de tension invisible : d'où vient cet homme, où va-t-il dans cet uniforme qui est presque certainement l'uniforme d'un membre des unité Schutzstaffel, ce SS inconnu arrive du bord e la photo et se dirige vers le fond. Il n'est inconnu qu'au premier abord, dès l'instant suivant, la fille aux cheveux blonds, à la jupe à carreaux et aux chaussettes noires jette un regard à l'homme en uniforme et dit à son amie :

  • Mais est-ce que ce n'est pas le portrait craché de Lubek ?

Et l'amour aussi a besoin de repos, de Drago Jancar, traduit du slovène par Andrée Lück-Gaye. Éditions PHEBUS.

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Commentaires
J
Bonjour Colo, j'espère que tu vas bien.<br /> <br /> J'ai appris plein de choses en le lisant. C'est un très beau livre, bon en même temps j'adore cet auteur, donc... à tout bientôt Claude
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C
Tu donnes fort envie de le lire, je connais peu et mal l'histoire en général et celle de l'ex-Yougoslavie sûrement.<br /> <br /> Je le note et espère que tu continues à aller mieux.
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