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De Bloomsbury en passant par Court green...
6 mars 2022

Furies

Furie
de Julie Ruocco
 

Bérénice est une jeune archéologue qui a arrêté ses études. Elle est devenue « receleuse » et travaille avec un ami de son père. Elle fait passer des pièces archéologiques en fraude.

Sa dernière mission la mène en Syrie, où une femme lui confie son enfant par désespoir. Elle sait qu’elle n’a plus d’espoir de vie, et que c’est la seule solution !

Bérénice est recherchée par la police et la pègre pour récupérer les bijoux « volés ». Elle est obligée de faire appel à Asim, un syrien exilé en Turquie pour lui fournir deux faux passeports.

À travers ces trois personnages, nous découvrons le conflit syrien, du début à aujourd’hui. Comment le peuple a essayé d’avertir le monde, de quelle façon la violence est montée… C’est glaçant. Comment et pourquoi, un jour Asim, pour sauver le peu de raison qui lui restait a décidé de redonner aux morts une nouvelle vie à travers des faux passeports. Comment sa sœur adorée lui a confié le plus grand des témoignages sur le sort de leur pays, avec la tâche de le faire connaître au monde entier. Page 49. Chacun guettait le réveil du géant sans savoir quelle serait sa nature. Sa sœur, elle, avait appris à lire entre les lignes, dans l’enchevêtrement des réalités qui se taisent. Elle savait que rien n’était acquis et que le régime avait élargi les failles dans la conscience des hommes. Taym se débattait pour que les civils le restent, que les prisonniers osent parler et que la vérité éclate. Malgré l’élan, elle pressentait déjà que l’adversaire n’avait plus de forme. Cela faisait trop longtemps que le régime avait usé la confiance, miné les esprits. Trop longtemps qu’il avait substitué le fantasme au réel et les parjures à la voix des vivants. Les prisons secrètes avaient été temporairement ouvertes. Il fallait bien faire de la place pour les manisfestants et les révolutionnaires. Alors, sans un bruit ni un remords, l’État avait relâché les vieux spectres du djihad. Des fanatiques abrutis par l’enfermement et la violence, recrachés au jour après des décennies de torture parce qu’on ne savait plus où entasser leurs corps.

Mon billet est vraiment un résumé succinct (j’ai perdu mes notes… enfin, je m’en suis servie pour allumer mon feu sans faire attention…), mais cela n’empêche pas au livre d’être vraiment très intéressant. « C’est un hommage puissant aux femmes qui ont fait les révolutions arabes, et à leur quête de justice. »  Et c’est justement l’histoire d’Asim et de sa sœur qui nous mène au cœur de ce drame historique, de violences, d’injustices… Page 247. Par vague, les mots revenaient et accéléraient le débit de ses pensées. Bérénice s’échauffait et se parlait presque à elle-même : - Ce que je ne comprends toujours pas, c’est que la mécanique génocidaire du XXème siècle ne nous a rien appris. Les survivants ont parlé pourtant, on n'avait plus l’excuse de la virginité. Il y a eu des conférences, des cours à l’école. On a vu les fantômes de l’extermination, on a croisé le regard de ceux qui ne sot pas revenus, en photo, sur des pellicules de cinéma. Rien ne pouvait plus nous être révélé de l’espèce humaine, ni sa cruauté, ni son courage. Alors pourquoi cette conscience nerveuse et aveugle à la fois ? La connaissance de ce que l’homme peut faire à l’homme nous aurait laissé sans force au lieu de nous révolter ?

Je profite de ce billet, pour vous signaler que ce soir, sur la 5, il y a un reportage : « Syrie, des femmes… dans la guerre.  De Kamal Redouani ».

Claude

Première page

Coïncidences

« On vit dans un monde de coïncidences. Un homme et une balle qui se rencontrent, c’est une coïncidence. »
Elle ne savait pas pourquoi, mais les mots d’Aragon, tournaient en boucle dans sa tête et elle ne pouvait rien y faire. Cela faisait pourtant longtemps qu’elle n’avait pas relu Aurélien. Elle fixait les grappes d’air qui s’agglutinaient à la surface de son café bouillant. On aurait dit des œufs d’insecte en train d’éclore.

-        Bérénice ? Tu m’écoutes ?

Ses yeux se levèrent vers son interlocuteur, un homme d’une cinquantaine d’années. Malgré l’ampleur de son embonpoint, ses grandes boucles serrées en essaims blancs et son teint sombre lui donnaient des allures de pâtre grec. Il plantait sur elle un regard sévère.

-        Si tu n’es pas prête, on arrête tout et je trouve une autre fille. C’est un coup trop dangereux pour envoyer quelqu’un qui plane.

C’était comme si les mots avaient percé sa bulle et que la rumeur de la terrasse se déversait lentement en elle. Elle était de nouveau à Pris, en plein cœur du Ve arrondissement. Les vapeurs des percolateurs et de café lui donnaient chaud.

Furie de Julie Ruocco. Éditions Actes Sud.

 

Capture d’écran 2022-03-06 183108

 

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